C’est triste à dire mais aujourd’hui, dans le petit monde des développeurs de shoot’em up, si tu ne t’appelles pas CAVE, tu n’existes plus. Alors que les récents propos d’Asada sur son blog ont semé une vague d’effroi chez les shmupeurs de tout bord, la sortie region free d’Eschatos en avril 2011 sur XBOX360 n’a, elle, soulevé qu’une vague d’indifférence. Pleurons un bon coup face à cette ignoble injustice et essayons ensemble de la réparer tout en nous tenant tous par la main.
Le titre est distribué par Qute et développé en partie à deux par Mach et M-Kai, à qui l’on doit les excellents Judgement Silversword (voir le test de max.faraday sur notre forum) et Cardinal Sins sur WonderSwan (ces deux perles sont présentes en bonus sur la version Xbox 360 et c’est pas rien). La première impression quand on découvre les menus est bonne : c’est plutôt joli et il y a beaucoup de contenu. On a d’abord le choix entre se lancer directement dans Eschatos ou alors, sur la version Xbox 360, sélectionner le Wonder Witch Classics qui nous mène aux deux jeux bonus sus-mentionnés. Une fois dans l’Echalote, plusieurs modes sont disponibles : Original, Advanced et Time Attack et, pour les deux premiers, cinq niveaux de difficulté dont certains grisés, mais on va y revenir.
La première impression quand on lance une partie est mauvaise : c’est horriblement moche. Sans trop forcer le trait, ça ressemble à un jeu Naomi qui ressemblerait à un jeu PlayStation raté. 3D sommaire, absence de textures, choix douteux de couleurs, techniquement et artistiquement il n’y a presque rien à sauver, même si le tout reste cohérent avec sa construction à la Raiden (on part du plancher des vaches pour finir dans l’espace). Et pourtant, assez vite, on est impressionné par l’efficacité de la mise-en-scène et le déroulement même du jeu.
Reprenant dans les grandes largeurs les bases posées par Judgment Silversword, le titre est découpé en zones courtes (appelées Area et au nombre de 26) durant lesquelles il faudra détruire des vagues complètes d’ennemis arrivant selon des patterns géométriques précis. Deux boutons sont utilisables, l’un pour un tir frontal puissant, l’autre pour un tir large mais peu efficace et enfin un bouclier à la durée limitée fait son apparition si on appuie sur les deux tirs en même temps. La durée du bouclier est représentée par une jauge en bas à gauche de l’écran, celle-ci se rempli lentement dès qu’on ne l’utilise plus. De manière générale on se retrouve donc en terrain connu, certains vaisseaux adverses et certaines Area ressemblant en plus fortement à ce qu’on a déjà pu voir sur WonderSwan.
Là où Escalope se démarque principalement de ses aînés, c’est dans sa mise-en-scène ultra dynamique : la plupart des interludes entre chaque section se fait via des mouvements de caméras spectaculaires et certaines phases de jeu s’effectuent selon des angles de vue différents.
Même si cet enrobage n’a finalement que peu d’intérêt et même s’il dilue la radicalité des précédents titres de M-Kai, il permet de faire admirablement passer la pilule des faiblesses formelles du jeu. Cette esbroufe n’entachant en plus en rien la visibilité ni la finesse du gameplay (à une exception prêt, l’Area 14 entre les trois bulbes violets), c’est tout bénéf’.
Bon, « faiblesses formelles », j’exagère un peu, parce que le jeu est soutenu par une excellente musique composée par le non moins excellent Yousuke Yasui (membre de SuperSweep et compositeur/arrangeur/remixer d’OST de shmups de kalitay). Avec ses airs simples et ses sonorités synthétiques qui fleurent bon le STG des années 80, on nage dans le bonheur. Maintenant qu’on a fait connaissance avec les bases, concentrons-nous sur les différents modes de jeu tout en continuant à nous tenir tous par la main.
Mode Original
Ici, la puissance des tirs et la durée de vie du bouclier n’évoluent pas. Quasi chaque vague complète d’ennemi détruite (il en faut parfois plusieurs) fait augmenter de 1 le multiplicateur de score en haut à gauche de l’écran. Chaque ennemi raté (c’est à dire qu’il sort de l’écran sain et sauf) fait baisser ce multiplicateur de 1.
Pour vous aider dans l’élimination pure et simple de tout ce qui croise votre route, des items jaunes et bleus marqués d’un « F » seront libérés par des sortes de barils sur lesquels il faut tirer. Ces items font disparaître toutes les boulettes à l’écran et causent des dommages à tous les ennemis (détruisant instantanément les plus faibles). La valeur maximale du multiplicateur dépend du niveau de difficulté dans lequel on joue (10 en normal, 20 en hard… ). Après chaque boss, la valeur retombe à 0 et à chaque fois qu’on se fait toucher elle diminue d’une façon que j’ai pas encore bien compris comment.
Mode Advanced
Le fonctionnement global est le même qu’en Original, à quelques détails près qui modifient littéralement le jeu. Des power up font ici leur apparition. Ils permettent d’augmenter la puissance et la largeur des tirs et en bonus ils accordent un « +1 » au multiplicateur mais en contrepartie ils diminuent la durée de vie du bouclier. Les items « F » qui vous aidaient dans le mode précédent vont ici vous poser problème et enrichir le gameplay puisque même s’ils conservent leur pouvoir destructeur, leur utilisation fait baisser le multiplicateur de 1 et fait office de power down.
Par contre ils transforment toutes les boulettes présentes à l’écran en bonus de point sous forme de machin pourpre. La valeur de ses machins dépend de votre puissance de tir. Toutes les boulettes cancellées via le bouclier ou la destruction d’un boss se transforment aussi en bidule pourpre. La valeur maximale du multiplicateur dépend itou du niveau de difficulté dans lequel on joue mais cette valeur max est différente de celle en Original (16 en normal, 26 en hard… ). Après chaque boss, la valeur retombe à 0 ou à 7 si on est strictement au-dessus de 7 à ce moment précis et à chaque fois qu’on se fait toucher elle diminue d’une façon que j’ai toujours pas encore bien compris comment.
Ces petits écarts par rapport au mode Original rendent cet Arranged complètement différent. La multiplication des façons de scorer permet d’aborder l’aventure de plusieurs manières et donne surtout l’impression d’être plus libre : il ne suffit plus de ne plus laisser aucun ennemi filer pour scorer, il faut aussi jouer avec les power up/down et le bullet cancelling.
Mode Time Attack
On repart du mode Original en difficulté Normal. Le déroulement est encore une fois le même mais il n’est plus question ici de multiplicateur ni de score. La partie débute avec un minuteur démarrant à 90 secondes en haut de l’écran qui nous montre le temps qu’il nous reste avant le Game Over. On dispose d’un nombre de vie illimité mais chaque vie perdue fait chuter de 5 secondes le minuteur. Par contre, finir une Area, battre un boss ou attraper un extend permettent d’obtenir un gain de temps non négligeable. Pas d’autres nouveautés à se mettre sous la dent dans ce mode qui fait plus office de bonus que de jeu à part entière tant le déroulement est le même qu’en Original.
Comme on l’a dit plus haut, pendant les premières heures de jeu, certaines options des menus sont grisées. Escabot possède un système de level proche de celui d’un RPG. Les scores réalisés in-game sont cumulés, le joueur monte d’un level dès qu’un palier de score est atteint et ce jusqu’au level 50. A chaque nouvelle étape franchie, on débloque des choses dans les menus ou tout simplement dans les possibilités offertes par le jeu. Par exemple, en plus de crédits, de vaisseaux, de modes de difficulté ou d’options visuelles supplémentaires, on peut accéder aux replays sur le leaderboard on-line à partir du level 20. Ce système peut paraître assez étrange au premier abord mais il se révèle au final plutôt réussi puisqu’il motive le joueur à scorer.
Une fois tous débloqués, cinq niveaux de difficultés sont accessibles pour les modes Original et Advanced. Les classiques Easy, Normal et Hard qui font varier le jeu d’un shmup oldschool au manic (ça fera plaisir à max.faraday qui avait bien vu le truc venir), un mode Hardest complètement abusé et enfin le mode Endless qui propose de looper les trois premiers modes de difficulté.
Même s’il ne réinvente pas la pluie et même s’il n’est pas dénué de défauts, Espadrilles a le mérite de creuser un sillon que peu de shmup empreinte et dont M-Kai maîtrise parfaitement les ingrédients (comme quoi, on peut avoir un pseudo commençant par « MK » et ne pas être un canard). Chaque Area peut être vue comme un mini-jeu, une énigme qu’il faut résoudre pour espérer détruire tous les ennemis et passer à la phase suivante avec le multiplicateur au max (ça couplé à la mocheté générale, on pense forcément à Triangle Service, voir le toujours mortellissime dossiay de la Hydeux).
La construction du titre étant assez perverse (quelques ennemis poussent à utiliser un type d’arme en particulier, hey ben paf, ça loupe pas, certaines vagues mélangent ces ennemis pour compliquer le tout) et le système de scoring étant punitif comme il faut, Eschatos va vous donner du fil à retordre.
Et pour ceux qui ne seraient pas encore convaincus de l’intérêt du dernier titre de Qute, la présence de Judgment Silversword et de Cardinal Sins justifie à elle seule l’acquisition de la galette sur Xbox 360. Bon, on ne va pas vous cacher que ces deux oldies IN-DIS-PEN-SABLES ne bénéficient pas de mode Tate ce qui risque de faire hurler les puristes qui ne jurent que par leur cathodique (m’en fous, je joue sur LCD), et du coup mon argument, pourtant béton, tombe un peu à l’eau. C’est d’autant plus dommage que le reste du jeu est particulièrement soigné dans sa présentation et dans les options qu’il propose. Ceci dit, ça coute moins cher de retourner sa télé que de se procurer ces mêmes jeux sur WonderSwan et ça vous fera plus les bras que de continuer à vous lamenter sur l’avenir de CAVE.