Après l’Espagne et de nombreuses apparitions publiques au Japon, exA-Arcadia a fait une apparition en France à l’occasion du Stunfest 2018. Shmup’Em-All a ainsi eu la chance de pouvoir discuter avec le président de cette jeune société, Eric Chung, afin d’en savoir plus sur ce nouveau système d’arcade inédit qui nourrit de grandes ambitions.
– Pouvez-vous présenter exa Arcadia ?
Eric Chung : exA-Arcadia est une plateforme basée sur une architecture PC dont les caractéristiques techniques sont supérieures à la PlayStation 4 Pro. Je pense que notre système est même plus puissant que les consoles actuellement disponibles sur le marché. Notre objectif avec exA-Arcadia est que cela soit simple pour des développeurs de créer un jeu sur notre plateforme, surtout depuis que les consoles et l’arcade ont toutes convergé vers une architecture PC. Nous aurions pu créer quelque chose de similaire à un FPGA (ndlr : circuit logique programmable), mais personne n’aurait souhaité créer des jeux pour nous à ce moment-là. C’est pour cela que nous nous sommes orientés vers une architecture PC pour notre système en arcade.
Lorsque l’on jette un coup d’œil à l’histoire de l’arcade, le système NEOGEO MVS de SNK est la plateforme ayant rencontré le plus de succès au monde. Aussi, nous nous sommes vraiment inspirés du MVS pour plusieurs choses, qu’il soit possible de brancher jusqu’à six cartouches sur une carte mère MVS par exemple ! Il sera ainsi possible de connecter jusqu’à quatre jeux sur exA-Arcadia. De même pour le fait que le système soit disponible partout et à un prix accessible pour les exploitants de salles, c’est quelque chose de très important.
Quand on regarde certaines régions du monde comme l’Amérique latine, l’Asie du Sud-Est ou encore le Moyen-Orient, on remarque que ces régions ne peuvent pas se permettre d’acheter les jeux d’arcade coûteux comme cela se fait au Japon. Par exemple le nouveau jeu Gundam, Mobile Suit Gundam: Extreme Vs. 2, qui sortira cette année coûtera $55000. Il n’y a aucune chance qu’une petite salle d’arcade, même au Japon, puisse se permettre d’acheter une borne à ce prix.
C’est la raison pour laquelle les exploitants de salles souhaitent avoir un système modulaire qui permet de changer les jeux facilement ; c’est pour cela que l’exA-Arcadia supporte jusqu’à quatre jeux simultanément. Nous souhaitons vraiment être le nouveau NEOGEO.

– Quel est votre rapport à la culture de l’arcade ?
EC : Comme vous le savez sans doute, je suis un grand collectionneur de PCB et je collabore avec la MAME Team afin de préserver ce patrimoine vidéoludique. C’est juste un amour des jeux. Le premier jeu auquel j’ai joué fut Galaga en arcade et depuis j’ai été impliqué, en tant que joueur, dans les jeux de combat. Cela a commencé avec Street Fighter II comme beaucoup de monde, puis j’ai découvert Virtua Fighter. J’ai joué à Virtua Fighter 4 à un niveau professionnel au point d’être le meilleur joueur aux Etats-Unis et finir second à l’EVO 2004. J’étais vraiment impliqué dans la communauté du VS Fighting. Mais il y avait des problèmes avec le marché de l’arcade en Amérique, où Virtua Fighter n’était même pas vendu. Certes nous avions Virtua Fighter 4, mais il y a eu beaucoup de versions et de mises à jour qui ne sont jamais arrivées en Occident, et en tant que joueur je me suis toujours dit « Pourquoi les choses sont ainsi ? ».
Puis au travers de ma collection de PCB au Japon, j’ai rencontré beaucoup de personnes comme Minoru Ikeda, le gérant de Mikado, ainsi que beaucoup d’autres salles d’arcade et des gens qui travaillent dans l’industrie du jeux vidéo japonais. J’ai également occupé un poste à hautes responsabilités dans une grande entreprise de jeux vidéo au Japon.
– Dans une interview accordée à Arcade Belgium, vous avez mentionné que le développement de l’exA-Arcadia avait commencé en septembre 2017. En l’espace de quelques mois on s’aperçoit que l’exA-Arcadia a réussi à convaincre des développeurs de renom comme G.Rev, Tanoshimasu ou Locomalito et affiche un line-up qui donne tout simplement le tournis. Honnêtement, depuis combien de temps l’idée de créer un système d’arcade vous trotte dans la tête ?
EC : C’est vraiment ce que nous avions écrit (rires), nous avons bien commencé l’aventure exA-Arcadia en septembre 2017. Je sais que cela semble être un laps de temps très court, et je pense que nous avons été capables d’être aussi rapides et efficaces car nous avons vraiment une très bonne équipe.
En ce qui me concerne, j’ai de l’expérience dans des start-ups à la Silicon Valley ainsi qu’au Japon. De même, les personnes autour de nous possèdent des connections avec différentes entreprises de jeux vidéo. Ces personnes comprennent toutes la vision qui anime exA-Arcadia ainsi que les changements que nous souhaitons apporter à l’industrie. Tous ces créateurs veulent la même chose : toucher le plus de personnes autour du monde afin qu’ils puissent jouer à leurs jeux. Et nous souhaitons avec exA-Arcadia créer cette connexion entre eux et les joueurs. Tanoshimasu, G.Rev, Locomalito et tant d’autres, ils comprennent tous cela.
– Durant la JAEPO, l’exA-Arcadia fut mise à disposition du public sur le stand de Safari Games. Est-ce un partenariat pour le temps de l’évènement ou sont-ils impliqués dans la création de ce nouveau système d’arcade ? Pour être plus précis, l’exA-Arcadia est-il un système d’arcade indépendant ?
EC : Safari Games est une filiale de Dimps. C’est leur société de distribution dans l’arcade et il se trouve que nous avons des connaissances qui travaillent chez eux. Beaucoup d’employés au sein de Safari Games sont en fait des anciens de SNK, mais ils ne sont pas du tout impliqués dans le développement de notre plateforme. Nous avons juste des rapports amicaux avec eux et ils ont été bien aimables de vouloir partager leur espace à la JAEPO avec nous.
Pour la distribution de exA-Arcadia au Japon, nous allons peut-être travailler avec eux, mais rien n’est encore sûr. Mais oui, en effet, tout le monde était surpris de nous voir à leur stand (rires).

– Pouvez-vous évoquer les studios de développement prêts à vous suivre pour valoriser votre système d’arcade ?
EC : En temps voulu nous annoncerons chaque studio qui travaille avec nous et vous pouvez être sûrs que tous les principaux développeurs de jeux d’arcade au Japon, en dehors des plus gros, nous rejoindront. Vous avez pu vous en apercevoir un aujourd’hui avec M2 qui vient officiellement de joindre exA-Arcadia.
Et même en occident nous avons beaucoup de développeurs prêts à soutenir exA-Arcadia avec des jeux, certes plus « indé », mais néanmoins assez connus. Cela peut-être des jeux qui ont pu être crowdfundés ou qui sont populaires sur Steam et d’autres plateformes. Ce sont au total déjà plus de 35 sociétés qui sont prêtes à soutenir exA-Arcadia.
gekko : Y a-t-il une chance, même infime, que CAVE se joigne à vous ?
EC : Nous adorerions travailler avec CAVE, mais comme vous le savez ils ont fermé leur division arcade il y a longtemps. C’est vraiment à eux de voir si c’est possible. Mais j’aimerais vite revenir sur des sociétés plus importantes comme Capcom ou Bandai Namco. La raison pour laquelle ils ont arrêté de faire ces jeux rétro qu’on aime tant comme Makaimura (ndlr : nom japonais de Ghosts’n Goblins) ou Contra pour Konami est que le retour sur investissement est trop faible, alors que pour un coût de développement identique ils peuvent développer un jeu mobile nettement plus rentable. C’est une situation très délicate et je voudrais que les gens gardent cela en tête. Mais bien sûr, si l’occasion se présente nous voudrions travailler avec CAVE et peut-être aurons-nous quelque chose qui surprendra le public plus tard cette année.
– Sur Twitter, on peut constater un message invitant des développeurs indépendants à vous contacter dans l’optique de proposer leurs jeux sur l’exA-Arcadia. Quels ont été les retours ?
EC : Je n’ai pas les chiffres exacts, mais beaucoup de développeurs, qu’ils soient japonais ou occidentaux, nous ont déjà contactés. Ils sont tellement nombreux que nous avons du mal à passer en revue chacune de leurs propositions (rires). Cependant, même si nous n’avons peut-être pas répondu à tout le monde, nous prenons soin de lire les e-mails et de jouer aux jeux qui nous sont envoyés. Beaucoup nous proposent des shoot’em up, mais il y a aussi dans le lot des jeux de combat et même des jeux de course ce qui est très surprenant. Il y a notamment un jeu de course qui est très très intéressant.
Parmi les jeux proposés, quelques-uns sortiront avec quelques changements. En effet nous travaillons avec les développeurs afin de retravailler leur jeu pour qu’ils puissent fonctionner en arcade, car c’est un environnement totalement différent comparé aux consoles et PC.
G : Oui, comme Super Hydorah AC qui comporte beaucoup de changements par rapport aux versions que l’on connait déjà.
EC : Exactement. Pour être franc je suis fan de Locomalito depuis longtemps, et j’avais pris contact avec lui il y a plusieurs années pour lui dire que son jeu devrait vraiment sortir en arcade, et je suis heureux que nous puissions enfin y arriver cette fois-ci. Avec Super Hydorah AC, nous avons pris certaines décisions très réfléchies en ce qui concerne l’équilibre du jeu pour mieux l’adapter à l’arcade. Au Japon, il y n’a pas beaucoup de joueurs qui utilisent Steam par rapport à d’autres pays, donc très peu de personnes connaissent Hydorah là-bas. Et quand nous avons montré pour la première fois Super Hydorah AC aux joueurs japonais, beaucoup ont dit qu’il ressemblait à un jeu X68000 tant visuellement que par ses sonorités et ce sont des remarques très appropriées car Super Hydorah correspond à peu près aux jeux de cette époque. J’espère que les gens sauront apprécier Super Hydorah AC, car je remarque que les shoot’em ups occidentaux ont une très mauvaise réputation depuis l’époque de l’Amiga et Atari ST où les jeux étaient très injustes.
G : Oui, à tel point que le terme euroshmup est devenu au fil des années une insulte (rires)
EC : Oui et je pense que Super Hydorah est vraiment un bon tremplin pour le changement de réputation des shmup occidentaux.
– Pour l’heure votre line up se compose principalement de shoot’em up. N’est-ce pas risqué comme orientation de catalogue en sachant que les shmup sont devenu une sorte de niche dans l’industrie du jeu vidéo ? Est-ce une volonté de votre part ou juste un début avant d’ouvrir d’autres perspectives ?
EC : Nous sommes ouverts à tous les types de jeux. Nous souhaitons avoir un line-up équilibré pour exA-Arcadia. Lorsque l’on regarde le lancement de la NEOGEO, les jeux proposés étaient très variés avec des jeux de sport comme Baseball Stars Professional, des jeux d’action avec Magician Lord, des shooters avec NAM-1975 et même des beat’em ups avec Ninja Combat. Plusieurs genres étaient représentés et nous souhaitons proposer la même variété.

Bien évidemment, nous travaillons avec Tanoshimasu pour Aka to Blue Type-R, qui a été le premier jeu à rejoindre le catalogue exA-Arcadia. Et c’est un titre vraiment passionnant, un danmaku à scrolling vertical qui a un très bon ADN. En fait il se trouve que tous les créateurs de jeux d’arcade au Japon adorent les shoot’em up et parce que depuis tant d’années ces développeurs n’ont pas eu l’opportunité de faire un jeu en arcade, maintenant qu’ils en ont l’occasion la première chose qu’ils veulent faire c’est justement un shmup ! C’est à la fois une bonne et une mauvaise chose, car si vous avez beaucoup de shmup, ils vont se cannibaliser au niveau des ventes. Ainsi en matière de shmup, nous essayons de contrôler au mieux ce que nous faisons, notamment en ce qui concerne les sorties. Nous avons beaucoup de shoot’em up dans nos pipelines, mais nous n’allons pas tous les annoncer ni les sortir en même temps.
Nous voulons d’autres types de jeux et nous avons révélé récemment un jeu de combat : The Kung Fu vs Karate Champ. Il ne sera pas le seul, d’autres jeux de combat vont sortir sur exA-Arcadia et nous les annoncerons bientôt. Nous allons aussi prochainement annoncer un jeu de puzzle similaire à Puzzle Bobble, et nous avons aussi un jeu de sport actuellement en développement. Nous essayons vraiment d’avoir le line up le plus diversifié possible.
Il y a aussi un point sur lequel nous nous concentrons avec les développeurs : le fait de faire des jeux jouables à quatre. Des jeux auxquels les gens peuvent prendre du plaisir à plusieurs ! C’est une chose sur laquelle nous nous concentrons vraiment, notamment pour le marché occidental. Nous avons déjà quelques jeux jouables à quatre simultanément, nous les annoncerons plus tard cette année.
– La salle d’arcade Mikado met beaucoup en avant l’exA-Arcadia. On pense notamment à la courte période de local test de Aka to Blue Type-R et Super Hydorah AC. Est-ce que Mikado participe au développement de exA-Arcadia ?
EC : Mikado est la plus importante salle d’arcade indépendante de Tokyo, par conséquent ils ont une clientèle de véritables passionnés qui s’y rend toutes les semaines. Pouvoir y faire des location-tests nous permet de vraiment avoir de très bons retours sur nos jeux et voir comment ils sont perçus. Minoru Ikeda qui est le propriétaire de Mikado, ainsi que le guitariste pour Aka to Blue, connaît très bien les jeux et il comprend vraiment le problème de l’arcade au Japon, normal me direz-vous puisqu’il possède une salle d’arcade. (rires)
Nous travaillons très bien ensemble et nous sommes ainsi en mesure de faire tester nos jeux dans sa salle et ainsi avoir des retours très utiles. Nous lui sommes vraiment très reconnaissants.

– Avez-vous déjà été contactés par des exploitants de salles ou de centres de loisirs comme Round One ou autres ? Disposez-vous d’un réseau d’exploitation potentiel en occident ?
EC : Au Japon nous avons été contactés par Round One ainsi que d’autres chaînes de centres de divertissement. Nous travaillerons probablement avec un très gros distributeur qui possède un réseau de distribution au sein de Round One, SEGA et Taito. On va probablement faire une annonce à ce sujet plus tard cette année.
Pour ce qui est du marché en dehors du Japon, comme par exemple l’Asie du Sud-Est, nous avons déjà été contactés par la plus grosse chaîne. Même chose pour l’Australie. Et en ce qui concerne les États-Unis, nous avons déjà pu discuter avec Dave & Buster’s. Nous sommes déjà en mesure de couvrir une bonne zone rien que sur ces quatre territoires.
Nous sommes aujourd’hui au Stunfest pour mieux comprendre comment fonctionnent le marché européen et les distributeurs. Je sais que les consommateurs en Europe sont vraiment inquiets parce que, si nous leur vendons directement notre système depuis le Japon, les taxes douanières seront trop élevées. Nous essayons donc de trouver un moyen de contourner ce problème. Durant le Stunfest nous avons pu parler avec des distributeurs français; notez que trois à quatre d’entre eux nous avaient déjà contactés auparavant. Nous allons essayer de trouver quelque chose qui puisse fonctionner pour les joueurs européens, ce qui est vraiment difficile, car l’Europe est un marché très grand et complexe.
– Pensez-vous que votre système puisse servir de moteur à la revitalisation de la culture de l’arcade et des salles d’arcade en occident et au Japon ?
EC : C’est exactement notre objectif et nous espérons que exA-Arcadia sera la plate-forme capable de faire revivre l’arcade au Japon, où les exploitants de salles ont vraiment du mal à survivre à cause des pourcentages sur les ventes que d’autres compagnies les forcent à appliquer.
Nous allons créer un nouveau moyen pour les exploitants de salles de gagner de l’argent, des revenues qui ne proviendraient pas seulement des pièces introduites dans une machine. Nous allons ajouter des services supplémentaires que nous n’avons pas encore annoncés. On en parlera probablement lors de la prochaine JAEPO en 2019. Nous allons faire en sorte que les exploitants puissent gagner plus d’argent et impliquer davantage leur consommateurs, et aucun autre système n’aura ce que nous pouvons faire. Vu que les exploitants de salles d’arcade aiment gagner plus d’argent, je pense qu’ils vont acheter plus de système exA-Arcadia
C’est ce que nous voyons du moins au Japon, et aussi dans des pays comme les Etats-Unis où l’on peut voir chaque mois ouvrir de plus en plus de salle d’arcade. C’est vraiment surprenant et beaucoup de gens ne le savent pas, mais si vous jetez un coup d’œil, le nombre de salles d’arcade indépendantes ne cesse d’augmenter ! Même une chaîne comme Dave & Buster’s ouvre environ un nouveau centre de divertissement chaque mois aux Etats-Unis. Il y a aussi Round One, une franchise japonaise, qui est récemment arrivée au Etats-Unis et qui projette d’ouvrir plus de 200 salles de jeux, ils sont vraiment très agressifs ! Sans oublier les indépendants qui ouvrent beaucoup de salles d’arcade dans tous les états. Et puis il y a la Chine: beaucoup de gens l’ignorent, mais la Chine possède un marché dont la croissance est la plus rapide au monde !
Nous espérons donc travailler avec les exploitants de salles de tous ces pays, et même d’autres tel que le Mexique, le Brésil ou l’Argentine où Capcom et SNK avaient une présence très importante, abandonnée il y a dix ou quinze ans. Nous voulons revenir sur ces marchés et faire en sorte que ces personnes aient accès à de nouveaux jeux. Je suis allé au Mexique en janvier dernier, et les exploitants m’ont dit « Si vous avez de nouveaux jeux similaires à ceux de la NEOGEO, nous les achèterons tous ». C’est vraiment excitant !

– Un nouvel acteur dans le monde de l’arcade est une curiosité dont personne n’aurait pu prévoir l’arrivée, surtout face aux solutions ALL.Net de SEGA et NESiCAxLive de Taito qui semblent plus intéressantes et adaptées pour une exploitation en salle grâce à leur solution de distribution de jeu en ligne. Qu’est-ce que l’exA-Arcadia peut apporter de plus à un gérant de salle ?
EC : Beaucoup l’ignorent, mais ALL.Net et NESiCAxLive prennent un pourcentage sur chaque pièce introduite dans une machine, et ce pourcentage peut aller de 30 à 50% selon le jeu et la plate-forme. C’est un coût très élevé pour un exploitant de salle, car non seulement il doit acheter la borne, acheter le système, mais en plus il doit payer d’autres frais. En fait, ils doivent acheter tout l’équipement réseau : routeur, serveur, plus des mensualités pour l’accès au réseau. Ce sont des systèmes très coûteux à mettre en place.
Et puis NESiCAxLive utilise un vieux système Taito Type-X2 qui tourne sous Windows XP. De nos jours, il est devenu difficile de travailler sur ce type de matériel, et je doute que les développeurs puissent l’exploiter encore longtemps. En outre, ces systèmes sont confrontés à la difficulté liée à la multiplicité de leurs jeux : NESiCAxLive propose de bons jeux, mais on arrive au même problème que sur l’App Store et Google Play : La clientèle consulte rarement le menu au-delà du premier écran, et ignore de ce fait quels sont les jeux disponibles sur la machine.

Une autre grande difficulté avec NESiCAxLive est que certains jeux sont jouables uniquement en solo, il n’y a pas de mode deux joueurs. Mais au Japon de nombreuses bornes sont tournées dos à dos pour les jeux de combat. Or, si le système n’est pas paramétré pour jouer à deux, un certain nombre de jeux sont évincés de la plateforme. Il n’y aurait que 40 bornes NESiCAxLive en configuration 2 joueurs dans tout le Japon.
G : C’est surprenant ! On aurait pu croire que NESiCAxLive et ALL.Net avaient une place nettement plus importante dans les salles d’arcade japonaises.
EC : Ces deux structures ont de bonnes fonctionnalités comme la distribution en ligne, mais lorsque vous avez autant de jeux, cela devient difficile pour les joueurs de découvrir quels sont les jeux disponibles. C’est une situation que vous rencontrez également lorsque vous ouvrez Steam.
Et comme vous le savez, NESiCAxLive et ALL.Net ne sont pas disponibles en dehors du Japon, et c’est un gros problème ! Prenez une salle en Asie du Sud-Est par exemple, qui n’est pas équipée d’une infrastructure réseau, alors que votre système demande à être connecté en permanence et que de plus vous faites payer l’accès à votre infrastructure en ligne, c’est impossible. Nous pensons pouvoir rivaliser avec Taito et SEGA parce que nous allons sur des marchés sur lesquels ils sont absents, tout en permettant aux exploitants de gagner plus d’argent.
Concernant ALL.Net, il ne leur reste plus qu’un seul jeu annoncé et ils ne semblent pas soutenir la plateforme de manière très agressive. Quand aux autres fabricants comme Bandai Namco et SEGA, ils ont essentiellement quittés l’industrie des jeux d’arcade pour se concentrer uniquement sur les « bornes de luxe », les bornes dédiées. Seul Taito fait encore des jeux « normaux » en arcade.
– Pour le moment, tous les jeux annoncés sur l’exA-Arcadia sont des portages de jeux déjà disponibles sur PC ou console. Comment comptez-vous donner envie aux gens de rejouer à ces titres qu’ils connaissent déjà ? Auront-ils une valeur ajoutée par rapport à leur version de salon, ou s’agit-il de portages directs ?
EC : Je voudrais souligner le fait que Aka to Blue n’est pas un jeu disponible sur PC ou console, mais sur smartphone (rires). Mais oui exactement, tout jeu sur notre plate-forme doit avoir du contenu exclusif pour l’arcade et qui ne sera proposé nulle part ailleurs. Sans cela, il n’y aurait aucune raison pour un exploitant d’acheter ces versions, n’est-ce pas ?
Aka to Blue Type-R ne sera disponible sur aucune autre plate-forme, c’est une exclusivité arcade. Super Hydorah AC est une version spécialement adaptée à l’arcade. Infinos Exa a une bande son réarrangée par Hyakutaro Tsukumo, et bénéficie de beaucoup de changements pour un usage en arcade. A mon avis, Infinos Gaiden est dans sa version originale assez facile, il sera donc réglé avec une plus grande difficulté en arcade. De même il y a quelques changements graphiques aux niveaux des boss et des patterns. Tous nos jeux sont ainsi améliorés. Strania EX proposera par exemple une nouvelle bande son réarrangée par Keishi Yonao et l’équilibrage du jeu sera revu en fonctions des retours des joueurs au fil des années et bien d’autres choses que nous annoncerons plus tard (ndlr : durant la CAX, il a été révélé que Strania EX comporte un mode inédit : Hell Mode).
De même The Kung Fu vs Karate Champ aura des personnages et des stages exclusifs dans sa version arcade et je pense que les gens apprécieront beaucoup les personnages exclusifs.
A mesure des succès rencontrés avec ces jeux, la prochaine vague de titres sera dévoilée. Comme je l’ai annoncé aujourd’hui sur la scène du Stunfest, nous travaillons avec G.Rev sur trois jeux et l’un d’entre eux sera financé par une campagne de crowdfunding et ce sera la suite d’un jeu que tout le monde attend.
G : Non… Ce jeu n’est pas ce à quoi je pense ? Vous plaisantez n’est-ce pas !?
EC : (rires)
– Est-ce qu’à terme, il y aura des exclusivités sur exA-Arcadia ?
Aka to blue Type-R sera une exclusivité exA-Arcadia, mais ce que nous voulons avant tout c’est permettre aux développeurs de recréer tout l’écosystème de l’arcade : dans un premier temps un jeu sort en arcade, et ensuite il arrive sur console. Ainsi les développeurs peuvent maximiser au mieux leurs revenus, ce qui leur permettra de créer plus de jeux. Nous souhaitons rendre cela possible, mais en même temps l’arcade a besoin d’avoir du contenu qui n’est disponible nulle part ailleurs, sinon cela n’aurait aucun intérêt.
Par le passé, prenons l’exemple de Capcom : ils sortent Street Fighter IV, Super Street Fighter IV et ainsi de suite en arcade, mais trois mois plus tard une version identique est disponible sur console et par conséquent plus personne ne va jouer à Street Fighter dans les salles.
Si l’on ajoute le fait, comme je l’ai expliqué précédemment, qu’il y a un pourcentage sur les parties imposées par Taito, cela crée une situation vraiment difficile pour les exploitants de salle et beaucoup d’entre eux vont refuser d’acheter la prochaine mise à jour parce qu’ils savent qu’en aucun cas ils ne pourront récupérer leur argent.
– Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur exA-Arcadia : architecture, spécificités ? Sous quels format seront les jeux ou encore la compatibilité au niveau des écrans et des connectiques (16/9, 4/3, Tate, Yoko, analogique, numérique, etc) ?
EC : exA-Arcadia est un système basé sur une architecture PC, nous utilisons Windows comme système d’exploitation afin que cela soit plus facile pour les développeurs de créer des jeux sur notre système. En ce qui concerne le support de stockage pour les jeux, ce sera sous forme de cartouche. Ainsi il sera possible de brancher jusqu’à quatre cartouches sur une carte mère, mais il faudra attendre encore un peu pour voir à quoi elles ressemblent.
G : Est-ce qu’une cartouche aura à peu près la même taille qu’un jeu MVS ?
EC : Elle sera plus petite, pensez à une cartouche CPS3 en termes de taille. Au regard de la connectique, exA-Arcadia est totalement compatible avec la norme JVS (JAMMA Video Standard). Je pense que nous avons effectué des tests avec toutes les périphériques JVS. Beaucoup sont disponibles sur le marché. Nous avons même testé notre système sur la CYBER LEAD de Namco ou la Windy II de Konami, des bornes très confidentielles au regard de leur ventes (rires).
Nous effectuons tous ces tests avec différentes types de bornes parce que, même si au Japon les bornes LCD remplacent au fur à mesure les bornes plus anciennes, ce n’est pas encore le cas partout dans le monde. Par exemple, sur le marché occidental, énormément de bornes sont encore équipées de CRT et nous devons être parfaitement compatibles avec celles-ci. C’est d’ailleurs un prérequis pour tous les développeurs de devoir supporter à la fois un affichage sur des écrans CRT et LCD. 16/9, 4/3, Yoko et TATE : tous ces types d’affichage doivent pouvoir être supportés. De même, nous avons un adaptateur en option qui permet de faire fonctionner exA-Arcadia sur un écran 31Khz et 16khz.

– Quels sont les canaux de distribution mise à disposition d’un professionnel ou d’un particulier pour se procurer l’exA-Arcadia ?
EC : Tout le monde est en mesure de pouvoir acheter notre système. Nous ne voulons porter préjudice ni aux particuliers, ni aux collectionneurs. Nous souhaitons qu’ils puissent se fournir où qu’ils soient dans le monde ! Dans un premier temps, en occident, nous vendrons exA-Arcadia par le biais de notre site internet. Par ailleurs nous lancerons prochainement les précommandes pour Strania EX.
Nous cherchons à optimiser nos ventes partout dans le monde, par exemple nous allons nous allier en Chine avec des sociétés et des distributeurs locaux. Vous pouvez bien sûr l’acquérir également en tant que particulier ! S’il vous plaît, achetez exA-Arcadia ! (rires)
– Envisagez-vous une version console de votre système à l’instar du NEOGEO AES ?
EC : Pour l’instant nous n’envisageons pas de créer une version console de l’exA-Arcadia. Nous pensons en effet que si vous êtes un fan d’arcade, vous êtes déjà équipé pour pouvoir jouer chez vous. Et développer une version pour un usage à domicile serait pour les développeurs à la fois plus coûteux et plus compliqué. Notre objectif est vraiment de soutenir le marché de l’arcade, donc non, ce n’est pas une priorité pour le moment.
– Pouvez-vous nous dire quels seront les tarifs pour une kit exA-Arcadia, ainsi qu’un jeu ?
EC : Nous n’avons pas encore annoncé de prix, mais un kit regroupant une carte mère plus un jeu devrait se vendre environ 2000 dollars et en fonction du jeu le prix pourrait se trouver dans une fourchette de 1000 à 1500 dollars. Nous y réfléchissons encore. Comme vous le savez sans doute, un nouveau jeu CAVE était vendu à l’époque environ 1800 dollars ; il s’agit donc d’un tarif standard au Japon.
– À quelle date pensez-vous commercialiser l’exA-Arcadia ?
EC : Cela dépendra des régions, des divers accords de distribution. Le but est de rendre disponible exA-Arcadia au plus vite, en fonction de l’état des différents marchés. Au Japon, en raison des accords de distribution, nous appliquons aux salles d’arcade du pays une stratégie élaborée. En occident, on va probablement commencer d’ici la fin de l’été par des ventes par correspondance à destination des collectionneurs.
Chaque jeu aura une édition très limitée réservée aux collectionneurs. Nous prévoyons de 20 à 50 copies, bonus inclus, tels qu’une boîte de jeu dédicacée, un boitier spécial, une photo des développeurs comme par exemple Hiroyuki Kimura de Tanoshimasu en train de dédicacer les boîtes de jeux. Elles incluront aussi des goodies comme un album de la bande originale ou encore un poster. L’idée est que chaque jeu ait sa version spéciale.
Nous pouvons dire que Aka to Blue Type-R aura droit à une version super-limitée ! Nous annoncerons son contenu plus tard, mais il n’y aura probablement au monde que cinq exemplaires de cette édition. Vous connaissez Enemy Zero sur SEGA Saturn créé par Kenji Ino ?
G : Oui, bien sûr !
EC : Il a fait une version super limitée de ce jeu disponible uniquement au Japon et il l’a livrée lui-même en main propre aux acheteurs. Cette version est contenue dans une boîte très imposante. Cherchez sur Google ! Nous allons faire exactement la même chose ! (rires)
G : (rires)
EC : Kimura-san de Tanoshimasu se chargera de les livrer en main propre au Japon, mais bien évidemment, nous ne pourrons pas faire ça à l’étranger ! (rires)
– Pour finir, après la JAEPO 2018, FightCade Offline 2.0 et le Stunfest 2018, quel a été le ressenti des joueurs ayant pu se frotter à l’exA-Arcadia ainsi qu’à Aka to Blue Type-R et Super Hydorah ?
EC : Très positif ! Les gens sont toujours contents de pouvoir jouer à de nouveaux shoot’em ups, notamment Aka to Blue Type-R. Cela fait six ans depuis DoDonPachi SaiDaiOuJou, et je pense que les gens sont très excités de pouvoir jouer à un nouveau danmaku à scrolling vertical en arcade et nous avons d’excellents retours. Nous n’avons rien entendu de négatif sur le jeu pour le moment.
G : Cependant les gens semblent avoir du mal à comprendre les mécaniques de Aka to Blue.
EC : Il y a une chose que Tanoshimasu va changer et c’est un nouveau prérequis pour tous nos jeux : l’ajout d’un écran d’explications des contrôles et mécaniques quand le jeu démarre, un peu comme pour les jeux NEOGEO, et c’est déjà le cas pour Super Hydorah AC par exemple.
D’ailleurs en parlant de Super Hydorah AC, nous avons fait plusieurs location-test au Japon afin d’obtenir l’avis de différents joueurs. Aka to Blue Type-R et Super Hydorah AC sont des jeux difficiles (surtout Super Hydorah AC), mais quand on comprend comment ces jeux fonctionnent, c’est moins compliqué. Je pense que les joueurs ont de mauvaises habitudes, comme tuer tous les ennemis à l’écran, et attraper tout les bonus possibles, ce qui n’est pas très adapté à Super Hydorah. A l’époque de Gradius, où l’on ne pouvait pas tout faire, il fallait avant tout survivre et faire de son mieux, aujourd’hui les joueurs jouissent de plus d’options.
Excellent, comme d’habitude, Merci les gars !